Lakmini Lodge, Sigiriya
Je rends grâce à cet italien rencontré à Trincomalee, qui m'a si facilement convaincu de modifier nos projets, à la dernière minute. Nous terminons un séjour de trois bonnes journées dans un paradis.
A Mihintale, déjà, nous nous étions réjouis des paysages splendides qui nous étaient offerts, du calme et de la sérénité que nous y avions trouvés et de la présence de Bouddha. Cependant, nous étions encore sur des sentiers très balisés du tourisme,avec tous les travers que cela occasionne dans les échanges avec les uns et les autres.
C'est donc sans plus de regret que nous nous étions mis en route pour Trincomalee. On ne se refait pas : l'appel de la mer résonnait. Nous constatâmes à nouveau les efforts soutenus pour reconstruire les infrastructures routières, même si nous dûmes nous affranchir de plusieurs portions de voies réduites à de simples pistes, au son du dub local, gonflé de bass dans les enceintes du bus.
Le Regish Guest House, sise à coté du French guest house, nous offrit les deux dernières chambres disponibles, qui donnaient directement sur la plage. De mon lit, la nuit, je pouvais contempler les lucioles dans la baie, constituées par autant de bateaux de pèche.
Entre 4h du matin et le lever du soleil, ceux-ci ramènent leur prise, essentiellement du thon et de la bonite, parfois du requin, ou de gros calamars. Il faut dire que leurs palangres, de presque 3 km, sont composées d'hameçons destinés à tenir des poissons de plus de 100 kg
Le contact de ses hommes est toujours aussi agréable. Francs, simples, et sans arrières pensées. On se lie facilement, et je m'imagine rester là avec eux, à partager ce quotidien...
Avant le breakfast, nous assistons à la pèche au filet de la plage. Trois fois par jour, une vingtaine d'hommes sont mobilisés pour ce labeur dont le spectacle est toujours agréable.
Ici,
nous sommes revenus en territoire tamoul. "Namaskar" et
"Nandri" comme autant de reprises de nos semaines au Tamil
Nadu. Mais, des fils de barbelés de ci de là, une pauvreté qui se
remarque à la maigreur des étals autant et encore plus dans la
variété des marchandises dans les magasins révèlent une bourgade
qui n'st pas encore désenclavée; si Trincomalee est appelée a
(re)devenir une station balnéaire attractive, nous en sommes encore
loin. Impossible de trouver un antimoustique ou une crème solaire.
Un petit supermarché offre pourtant du papier toilette. Finalement,
on réalise vite, en ayant d'autres références, que les sourires et
l'accueil sont encore malaisés et gênés.
C'est
une barrière que l'on devine, l'affirmation d'une identité révélée
par quelques mots d'une langue que l'on ne doit pas parler trop haut.
A l'inverse, lorsque l'on rencontre un cinghalais, la fierté
s'affiche, sans timidité.
Ainsi,
nous ne regrettons pas Jaffna. C'était un souhait, rendu encore plus
possible par la rencontre d'un homme avec lequel j'avais sympathisé
et qui aurait pu nous introduire. Mais si le site est mythique, la
morosité, la peur et les séquelles de la guerre sont
apparemment omniprésentes et nous ne sommes pas là pour un
reportage, avec la suspicion que cela comporte encore de se rendre
là-bas. Aussi, malgré la qualité de l'eau, de la plage, autant que
la modicité du prix des prestations, nous savons que nous avons
encore beaucoup à découvrir. Nous devons retrouver des amis dans le
Sud d'ici quelques jours, et nous comptons faire une étape avant.
Comme nous ne sommes pas d'emblée attirés par les sites
touristiques, nous envisageons un repli vers Kandi, grosse ville à
mi parcours.
On
se perd à nouveau dans le guide, avec l'espoir qu'un nom ou
l'évocation d'une région ne suscite le désir. Ainsi, pendant des
heures ce fut Kandi, avant que je ne rencontre Sergio, un fin
connaisseur du pays. Il évoque Sigiriya, renommé pour son palais
perché sur un rocher; l'une des plus grosses attractions de la
région.
Mais
c'est aussi un petit village, qui ne pâtit pas des flux de
touristes qui ne font que passer dans la journée. Pourvus de
l'adresse d'une guest, nous arrivons à la station de bus. Un dernier
coup de fil confirme la disponibilité d'une chambre que je réserve.
Et, au lieu de prendre le bus, nous nous laissons tenter par le
trajet en rickshaw. Plus de 100 km : c'est une nouveauté !
Relativement inconfortable mais avec le plaisir de pouvoir s'arrêter
quand bon nous semble, et pour un prix raisonnable.
Au Lakmini Lodge, l'accueil est formidable. Notre hôte se met en quatre pour que nous soyons bien occupés, attentifs à nos attentes. Ainsi, il comprend vite que nous ne sommes pas là pour le palais, mais pour profiter de la nature, des paysages, et des hommes qui l'habitent.
Ainsi, il nous propose l'ascension d'un second rocher, au pied duquel résident quelques moines auprès d'un temple vieux de 1500 ans, creusés à même la roche. Nous y retourneront à deux reprises, notamment ce matin pour assister au lever du soleil. Spectacle grandiose de la jungle qui se réveille, une heure de contemplation et de méditation. Bonheur !
Des marches dans la nature, à la rencontre des paysans et des rizières...
La
ballade en éléphant, classique, mais toujours un plaisir pour les
enfants...
Nous
serons passés à coté des deux grandes attractions de Sigiriya : la
visite du rocher et le safari, qui consiste en une demi journée de
jeep pour aller cotoyer, au milieu de dizaines d'autres véhicules,
des gros troupeaux d'éléphants sauvages.
Non
loin de la maison, une réserve d'eau nous offre un lieu de baignade
insolite. On s'attend juste à se retrouver seuls pour un petit bain,
et l'on découvre finalement que des paysans du coin y viennent aussi
pour une lessive ou pour se laver. Les femmes se dénudent et
revêtent une sorte de pagne, s'en s'offusquer de notre présence.
Les petits poissons mangent nos peaux mortes dans l'eau, sans que
l'on ait à payer pour ça, comme en Thaïlande ou au Cambodge.
Nous
quittons Sigiryia en ayant tous le sentiment d'avoir découvert l'un
des beaux visages du Sri Lanka, comme une petit coin de paradis. Nous
aurons tous l'envie de revenir ici. De belles rencontres ont en plus
marqué ce séjour, dont certaines ne seront pas sans lendemains -
ultime magie du voyage, quand on sait que ces souvenirs sont
partagés.
Quelque
chose s'est passé ici. Nous avons fait un grand pas dans notre
ouverture à ce pays, avec l'impression que ce pays a beaucoup
de simplicité, d’honnêteté et de douceur à offrir. On
comprend mieux, tout à coup, l'attachement de certains à Ceylan,
comment on peut en tomber amoureux.
Une
nature sauvage (en me promenant l'autre soir, des personnes se sont
arrêtées pour me dire de faire attention aux éléphants sauvages,
qui peuvent traverser la route et vous bousculer; Théodore qui
manque de marcher sur un scorpion; les varans qu'on croise un peu
tout le temps) ; des paysages somptueux très accessibles; toutes ces
plages; partout des jardins et une culture de la propreté qui
tranche avec les images de l'Inde....
Les
sacs sont presque bouclés, la route nous appelle (en Rickshaw pour
350 km !!!)